J’ai écrit un certain nombre de textes. Des gens précieux ont donné de leur temps et de leur esprit pour m’en dire des choses. Ça m’a comblé. Mais au fond c’est une activité qui s’inscrit parmi les autres : dans la compétition imbécile où cette époque rassemble les entreprises les plus diverses pour les ramener à de simples et effrayantes questions. Qui a le mieux fait? Qui peut dominer les autres? Qui mérite d’être le plus payé? Mes textes n’ont pas échappé à la règle, désormais quasi sacrée, d’être le plus rentable. La preuve, c’est que les gens qui me connaissaient ou croyaient m’être liés se sont crus en droit de me répondre sur le simple plan de la vie qu’ils menaient par rapport à la mienne. J’ai par exemple reçu des réponses de gens de ma famille qui ont sauté sur l’occasion de me dire ce qu’ils pensaient. D’autres qui étaient mes amis ont voulu me demander compte. Dans les deux cas, la littérature avait manqué son but : être pure exaltation de l’expression, ce que quasiment plus personne ne comprend. Je le redis gratuitement : personne n’est ici, vous avez affaire à des textes, c’est-à-dire beaucoup plus, dans la plupart des cas, qu’à quelqu’un. Il ne sert, je le sais, à rien d’expliquer ces distinctions. L’époque, encore elle, ramène l’individu à sa vie individuelle. Vie sans effort et sans pensée qui excède finalement le plus primaire de l’intérêt personnel. Je souffre, donc j’ai le droit. Mais vous êtes ici sur une page tout autre, qui ne tient compte des individus que dans la mesure où ils sont capables d’être plus qu’eux-mêmes. Prétentieux vous me direz mais non : c’est totalement gratuit, vaquez à vos occupations si vous avez mieux à faire.

De dépit, j’ai failli renoncer bien des fois. Je prétends, oui, et je ne dois rien ici à personne puisque ce n’est pas moi qui parle. Si, vraiment, cela vous dépasse, vous devriez vraiment, pour votre bien, arrêter de me lire.

Le fait même que je continue prouve que la littérature existe.

En remerciant ceux qui ont compris et font de même, même en ne faisant rien, ce qui est aussi un exploit.

Sébastien

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