« J’accuse », de Polansksi : au bout de 30 secondes, tu te rends compte que c’est ça le cinéma, que c’est un chef d’œuvre. Tu passes les deux heures trente à te dire que ça conforte l’idée, malgré les maladresses, le consensus à la réception moderne (il fait même des compromis, eh oui) et à la fin, tu te dis : ça faisait longtemps que j’avais pas vu un vrai film. L’art de la mise en scène y confine au sublime, c’est d’ailleurs là qu’est le film (le fenêtre qui ne s’ouvre pas, les plans larges de rencontre qui n’arrive pas pour dire le vide de l’Histoire, le comique mêlé à l’épique, le seul grand rôle de Dujardin, le cadrage, la lumière, le montage entre l’intime et l’archive, la façon de filmer les lettres, les rapports, les documents accablants, la rédemption du fautif orchestrée presque par Stravinski, la leçon qui en découle pour « la France », etc.) C’est un porc, ça a été un porc, il mérite la taule ? ok, en cellule et qu’on voie ce qu’il dessine sur les murs avec un bouchon brûlé. C’est pas la question, le génie n’excuse rien, bien sûr mais Matzneff, vrai prédateur salaud, n’a jamais rien écrit qui vaille l’acclamation. Qu’on le foute en taule et qu’on lui donne la palme à Cannes : vous confondez les symboles ! Les vraies ordures n’ont rien créé de bien. Si l’art est là , c’est qu’il n’y a rien dedans l’œuvre qui fasse l’apologie de la barbarie. Rien dans les films de Roman n’excuse la maltraitance de qui que ce soit. Que lui dirais-je à table, j’en sais rien mais ne pas regarder un des plus grands réalisateurs vivants, puisque Lynch est mort, c’est ne rien attendre de l’art. Et je crois que c’est ce dont l’époque souffre : ne rien attendre de l’art. Ne pas « croire » à l’art, et, même sans objet de croyance, ne pas savoir ce que c’est, ne pas savoir à quoi ça répond : la peur de la mort, et son ablation nécessaire. Moi, Polanski m’a réconcilié avec la vie.

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