Les vagues (13ème poème de La suite en x)

Hasui Kawase, Sôshû Shichiri-qa-hama (Moonlight at Shichiri-ga-hama), Sagami Province, 1930.

Les vagues

13ème poème de La Suite en x

Montre-moi l’araignée qui tissa ton berceau
Désigne-moi la lune attachée à te naître
la surveillante en chef qui te donna cette peau

L’ardoise frotte le silex pierre à fusil odeur cobalt

C’est en plein cintre aucune vague n’attendra notre retour
A plat dans la main du temps elles commentent inlassablement l’horizon

Toute entière à replier nos désirs futurs chacune sur la main du temps
bien à plat aucun dessous pourtant froissé au pied du lit ne rendra jamais ton odeur
A cet instant où tu fus prise par le feu comme une maison hantée
tes yeux plein d’épouvante et ton visage apesanteur

Odeur d’ardoise et de silex nos corps frottés bien à plat dans la main du temps

Le temps tape à plat sur les images
Pour les graver dans un mensonge
Et ça l’amuse

Passons entre les coups de pilon et soyons plus minces que deux feuilles
Que la sève d’automne aurait collées entre elles
sans interstice

Toi seule double l’horizon qui ment au loin
Pose-toi comme une main à mes côtés comme une empreinte en filigranes sur la plage
du présent si plat si plat
si bien derrière que devant
Nous n’échappons ni à l’instant ni à l’époque
mais peut-être peut-on ne plus sentir
l’effort qu’on fait pour en sortir
si on ne bouge plus
si on ne dit rien
si on ne parle plus qu’avec les mains
si on se tutoie enfin

nous deux genoux face à la mer et face au vent
c’est la bombe à retardement
je t’attends là

deux petits bonzes
ou deux santons
Nos deux genoux
et l’océan
nos deux genoux
comme un vide qui trouverait sa forme et du fond sans présentation
donne-moi une seule raison de ne pas résister
la fin du monde a eu lieu soyons l’écho
quand mes pensées faisaient des taches sur ta peau jusqu’à te faire des bleus si je pensais plus fort
et si je panique tu saignes
nos deux genoux
nos deux genoux
et l’océan

tout le monde a mal
tout le monde a peur
tout le monde est froid
tout le monde est seul
tout le monde s’ignore
et chaque vague crève d’une promesse offerte à la grève
et chaque vague se délivre d’un soupir qui la fait mourir
et chaque vague
nos deux genoux
et chaque vague
nos deux genoux
nos deux genoux et l’océan

S, Paris, Dimanche 22 octobre 2017

image de couverture : Hasui Kawase, Sôshû Shichiri-qa-hama (Moonlight at Shichiri-ga-hama), Sagami Province, 1930.

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