Fugues
Je m’en vais, tout est derrière moi c’est rare, j’avais tant de mythologies en tête : charmes levez-vous, flammes musiques envahissez le ciel que je ne regarde pas le décor.
Vibrez, tambours, il nous faut des bras longs comme les estuaires, les eaux se mélangent, le temps n’est plus la mémoire, on s’étend, la vie est bleu d’un bleu qui n’existe pas.
A la pointe des cimes, le ciel déversait du vent, le froid avait des ondes, on se sentait portés, l’intérieur des maisons étaient tendues de vieilles images ; il fallait chevaucher dans le vent, le crâne en arrière, yeux exorbités, larmes de passages, morsures pour requinquer : pilote, vogue, femmes aux cheveux verts qui me regardent en passant, une fumée au coin des lèvres. Amours, amours, multipliez cette existence insipide, je suis à genoux et en mouvements. Ne sondez plus les profondeurs, mes sœurs, nous sommes animés d’un souffle sans fin que rien n’épuise : balafres, plaies en suspens, cœur qui se mange, rien n’est plus qu’une ordalie, je vous serre, je vous sens, vous respirez mon âme, je suis à genoux, sanglant et simple épithalame : ardent, debout et vibrant, vibrant, d’une singulière envie, la dent, par en-dessous.
illustration : Rousseau, La Guerre, 1894.